Diaspora est le récit de la fuite de l'humanité devant un événement cataclysmique, un fort rayonnement électromagnétique de haute énergie, suffisamment puissant pour anéantir toute forme de vie dans notre galaxie d'ici quelques centaines d'années.
Vers les mathématiques et au-delà !
Je dois dire que ma lecture a été assez laborieuse... surtout au début. J'ai trouvé les premiers chapitres assez ardus, il a fallu que je m'accroche. Dès le premier chapitre, on assiste à la conception et à l'éveil à la conscience de Yatima, un citoyen créé au sein d'une communauté de logiciels conscients, une polis. L'introduction à l'environnement dans lequel évoluent ces entités, les citoyens de la polis, se fait sans préambule, on est directement plongé dans l'envirosim, où chacun se représente sous la forme d'un avatar de son choix et arbore une icône accompagnée de balises gestalt (je me suis rendue compte au milieu de la lecture qu'un glossaire est présent à la fin, bien utile pour mieux comprendre toutes ces notions...)
On enchaîne ensuite sur le deuxième chapitre avec un cours de mathématiques sur la courbure de l'espace, pendant lequel Yatima joue avec la dimensionnalité d'un tore puis d'une sphère... Inutile de dire qu'il faut vraiment s'accrocher, et avoir une certaine aisance d'abstraction pour se représenter des formes géométriques en quatre dimensions spatiales...
« Yatima était de retour dans la savane de son envirosim, jouant avec un tore quadrillé de polygones, quand Inoshiro envoya une carte annonçant sa visite ; la balise entra dans l'envirosim comme une odeur familière portée par le vent. » p. 57Et ce n'est que le début ! Le roman est parsemé de ces explications poussées de mathématiques et de physique atomique qui donnent par moment l'impression de lire un article scientifique... Alors il faut reconnaître que l'auteur avait à cœur d'expliquer au mieux les concepts à la base de l'univers qu'il a inventé, et de façon la plus cohérente possible scientifiquement, mais le degré de détails mathématiques et physiques m'a paru un peu superflu (pour la simple raison que je ne les ai pas compris...). Il va sans dire qu'un certain bagage scientifique est absolument nécessaire pour appréhender les idées développées, jugez vous-même :
« Une particule longue avec une suite de trous de ver "fermion-boson-fermion-fermion" se mettrait en opposition de phase et reviendrait à sa phase initiale comme un simple fermion après une puis deux rotations, mais une troisième rotation la remettrait en phase immédiatement. » p.270
Abstraction faite de ces concepts abstraits…
Cela étant dit, si je fais abstraction de ces explications mathématiques et physiques un peu trop poussées à mon goût (mais en même temps il fallait s'y attendre, c'est de la hard SF...), l'univers du roman est assez fascinant. L'humanité a évolué en suivant trois branches, les enchairés attachés à leur corps humain, génétiquement modifié ou non, les gleisners, incarnés dans des androïdes, et les personnalités dématérialisées sous forme de logiciels conscients qui vivent éternellement au sein des polis. C'est cette dernière frange de l'humanité que nous suivons tout particulièrement sur plusieurs siècles, et qui entamera une diaspora à travers la galaxie pour comprendre la physique d'un phénomène cataclysmique qui a menacé et pourrait encore menacer la vie dans la galaxie. Car physiquement il y a quelque chose qui cloche : la collision des deux étoiles à neutrons qui a provoqué un fort rayonnement de haute énergie n'aurait pas dû avoir lieu, ou pas si rapidement... On rencontrera en chemin des formes de vie inattendue (comme les Tapis de Wang, qui ont fait initialement l'objet d'une nouvelle qui figure dans le recueil Océanique), pour aboutir sur la découverte d'une théorie cosmologique non moins ébouriffante (même si les détails m'échappent encore...)
***
Malgré quelques passages un peu ardus qui me sont passés par dessus la tête, je ne regrette pas d'avoir lu ce roman jusqu'au bout, même si je comprends que cela puisse être un réel frein pour certains. Le sense of wonder est cependant bien présent, Greg Egan nous dépeint un univers fascinant et cela vaut le coup de s'accrocher pour faire partie du voyage qui mènera Yatima aux confins d'un univers renversant. Il ne fait pas de doute que je me pencherai sur les nouvelles de l'auteur, et peut-être bien sur le Bifrost qui lui est consacré.
***
Diaspora
Greg Egan,
Le Bélial', 2019 (1997 en VO)
366 pages
Hm. J'avoue que l'extrait sur la particule longue laisse pantois. :D
RépondreSupprimerN'est-ce pas ?? quand je dis qu'il a fallu m'accrocher... mais heureusement, il y a aussi des phrases compréhensibles :D
SupprimerOuch! Et une rotation à l'endroit, une rotation à l'envers... C'est un peu comme le tricot, non?
RépondreSupprimerFaut avoir envie de savoir ce qui arrive à notre galaxie pour aller jusqu'au bout!
Chapeau! ;)
Peut être, mais je ne sais pas tricoter XD
SupprimerCe qui n'aide pas non plus, c'est que je lis généralement le soir, juste avant extinction du cerveau ^^'
Je crains fort que la physique ne soit pas suffisamment ma tasse de thé pour tester, je passe mon tour ^^
RépondreSupprimerJe comprends ! Je t'aurais bien suggéré de tester les nouvelles (que je n'ai pas encore lues cela dit, mais j'imagine que le format laisse moins la place pour les détails scientifiques aussi fouillés), mais je connais ton enthousiasme pour ce format...
SupprimerDonc a priori il est possible d'apprécier ce roman en passant complètement à côté des explications scientifiques ? Je dois avouer qu'Egan m'intéresse beaucoup, j'ai lu quelques nouvelles de lui et elles m'ont à chaque fois retourné le cerveau comme une chaussette. Il me fait cependant assez peur aussi à cause de la hard SF mais ce que tu dis tend plutôt à me rassurer.
RépondreSupprimerAlors c'est quand même un peu frustrant, je dois le reconnaître, quand on ne comprend pas un passage, il y a toujours cette petite crainte de passer à côté de quelque chose... et j'imagine que celleux qui sont vraiment calé.e.s en physique et en maths doivent avoir leur cerveau encore plus retournés, mais même sans comprendre vraiment les détails, on peut quand même avoir l'effet waouh :)
SupprimerSi tu veux je pourrai te le prêter, si tu veux tenter le voyage...
Je ne crois pas que je commencerai par celui-là, plutôt un recueil de nouvelles.
SupprimerJe comprends tout à fait ce que tu veux dire avec la frustration et la crainte de passer à côté d'un truc mais si le roman fonctionne c'est tout ce qui compte. Mon échelle de peur de Egan vient de descendre de 3 points :p
Bon ça confirme ce que je pensais, Egan sur le format court ça me plait bien, par contre pour le format roman je vais passer mon tour xD
RépondreSupprimerJe te comprends ! ça m'a bien donné envie d'essayer les nouvelles en tous cas !!
Supprimer